LA FABRICATION DES PAPYRUS
La papyrologie tient sa spécificité de plusieurs facteurs. Cette page est consacrée aux considérations purement botaniques (relatives à la plante à l'état naturel) ou techniques (comment l'on fabrique des papyrus). La page suivante est réservée aux facteurs historiques, sociologiques et géographiques de la conservation des papyrus.
Facteur botanique
Les planches de papyrus sur lesquelles les habitants de l'Égypte écrivent leurs textes sont assemblées à partir de tiges coupées et séchées de la plante du même nom (en botanique, on la nomme cyperus papyrus). Jadis, elle poussait le long du Nil et dans le Delta avec abondance et de manière endémique. Depuis la mise en eau du barrage d'Assouan et les campagnes contemporaines d'assèchement des berges du Nil, le cyperus papyrus a quasiment disparu d'Égypte. Mais il subsiste à l'état sauvage dans toutes les zones humides de l'Afrique subsaharienne, de même qu'à Madagascar et en Sicile. Aujourd'hui, l'on cultive aussi cette plante pour l'agrément dans tout le pourtour méditerranéen, en Inde, en Australie et en Amérique.
La cueillette du papyrus et sa transformation en support de l'écriture datent de près de 5 000 ans, c'est-à-dire qu'elles ont suivi de près l'invention de l'écriture (vers 3 200 avant notre ère). Mais le papyrus, cueilli à des degrés divers de maturité, pouvait servir à d'autres usages : consommation humaine, vannerie, fabrication d'embarcations légères. L'usage du papyrus pour l'écriture était courant dans l'Antiquité dans tout le bassin méditerranéen mais, sauf exception, il n'a été préservé jusqu'à maintenant que dans les régions désertiques de l'Égypte limitrophes des régions habitables (vallée du Nil, Fayoum, Delta, Oasis). Nous y revenons plus loin. Il serait intéressant de pouvoir comparer sa culture, sa cueillette et ses usages avec ceux du jeune bambou dans l'Asie Orientale. Nous aborderons à la suite le seul usage du papyrus à des fins de conservation des écrits.
Facteur technique
Le papyrus est cueilli, découpé en fines lanières et assemblé selon des procédés rapportés longuement par Pline l'Ancien (dans son Histoire Naturelle, Livre XIII, chapitres 21 à 27). Platon, Théophraste en ont parlé plus succinctement. Aristophane, Cicéron et Jules César, parmi d'autres, citent les usages qui se font à leurs époques de l'écriture sur papyrus, respectivement en matière financière et commerciale, pour la correspondance, comme supports de livres. Ils n'ont pas développé la question de sa fabrication. Pline énumère six qualités dans la production de papyrus, dont les cinq plus fines utilisées pour l'écriture et la plus grossière pour l'emballage des marchandises.
Le papyrus destiné à l'écriture est cueilli encore vert, pour des raisons de souplesse des fibres et d'humidité. Sa tige est découpée en fines lamelles sur toute sa longueur. Celles-ci sont disposées horizontalement dans les deux sens (en longueur et en largeur, les deux dispositions se croisant à angle droit) sur une table humidifiée (tout simplement par l'eau du fleuve), puis égalisées de manière à présenter des bords bien droits. Les impuretés naturellement présentes dans l'eau réagissent avec les bandelettes pour produire une colle. Séchées lentement aux rayons du soleil, pressées, elles forment dès lors une surface qui peut être affinée par lissage (grâce à une dent ou mieux, avec le bord d'un coquillage). Puis, les feuilles produites sont assemblées, jusqu'à vingt à la suite) grâce à une colle produite par de la farine ou de la mie de pain trempée d'eau bouillante et humectée de vinaigre, enfin disposées en rouleaux et à nouveau pressé par coups répétés de maillet aux encollements. Le rouleau finit de sécher.
Une fois bien sec, le rouleau n'a plus qu'à être déployé pour recevoir l'écriture du scribe, à l'aide d'un calame trempé à l'encre.